Corse: ou l'art de bivouaquer sur la plage

Il est étrange de se sentir à l'étranger lorsqu'on circule encore en France. C'est pourtant la sensation que j'ai eu en Corse. Non pas au niveau des paysages mais plutôt une sensation générale qui n'influence en rien la beauté de cette île.

 

Et me revoilà, en kayak, de nouveau. Sans vouloir généraliser il semblerait qu'une règle s'est établie au cours de mes voyages: ne JAMAIS partir en kayak le soir. Premier jour, par une mer un peu démontée, rien de bien violent mais tout de même assez désagréable pour gâcher une balade, un des kayaks se retourne. Repéchage en 4ème vitesse et retour sur la plage 5 mn après l'avoir quittée. Nous serons quitte pour une nuit non prévue sur une toute petite plage.

 

Pour rattraper le temps perdu la veille, nous nous réveillons de bonne heure et partons à l'assaut des vagues qui se sont, heureusement, calmées pendant la nuit. Belle traversée bien qu'à un rythme soutenu.

Arrêt sur une plage pour le repas de midi. Tout le monde participe, voilà l'un des concepts du kayak que j'aime le plus. L'esprit de corps. Bien évidemment certains se spécialisent et plus particulièrement celui préposé au compactage des conserves. Il y a quelque chose d'assez primal dans le fait d'aplatir une boite de petits pois avec une pierre.

 

Question: quand on est fainéant comment faire du kayak? La réponse est simple: attacher les kayaks ensemble et tendre comme une voile avec une pagaie la bâche nous servant pour les repas. Honnêtement c'est un tout petit plus compliqué que cela mais cela permet de traverser un golfe tant que le vent se maintient.

 

Un des éléments cependant venait gâcher ce beau parcours, celui de l'administration du littoral. Malheureusement le bivouac sur les plages est excessivement règlementé (trop) et il ne reste dorénavant qu'une poignée de criques où l'on peut s'installer. Apparemment cela serait pour des raisons visuels et sanitaires. En voyageant en groupe on produit plus de déchets ce qui salie les belles plages corses. Bien que je déteste qu'un site soit défiguré je m'oppose à cette conception que des kayakistes polluent les sites visités. Au contraire, l'effet de groupe fait que les gens sont encore plus enclin à ramasser tous papiers, détritus et autres. D'expérience personnelle un couple avec enfants salira bien plus une plage que 10 kayakistes.

 

Ceci mis à part la journée se déroule simplement: On se lève, on range son sac de couchage, petit dejeune, on finit de ranger ses affaires dans les caissons étanches du kayak en espérant ne rien avoir oublié (rien de plus frustrant de devoir tout réouvrir pour récupérer ses lunettes de soleils), départ, pause midi, nage ou bain de soleil, re depart, re arrivée sur une plage pour la nuit. A partir de ce moment on commence à préparer le repas du soir en guettant le coucher de soleil tout en cherchant du coin de l'oeil l'endroit le plus propice pour étaler son matelas. Si on se débrouille bien on n'aura besoin de la frontale qu'a partir du dessert."Sécurité, sécurité, sécurité". la radio crépite et nous attendons fébriles le bulletin météo du lendemain. "vent non significatif", parfait nous pourrons passer le cap sans trop de problème et jouer à frôle-cailloux. Ce jeu est très simple, suivre la côte et passer entre les cailloux la composant. Plus l'écartement est réduit est meilleur c'est. Ca racle, le gouvernail saute, on se fait quelques frayeurs à cause d'une vague plus grande que les autres. Sympa en somme.

 

En Corse j'aurai tout eu: mer d'huile, vent fort, vent plus houle, houle, pluie,...

 

Le pire? bloqué un jour sur une plage à cause d'une houle significative. Cerise sur le gâteau, la visite d'un sanglier en pleine nuit qui s'est attaqué à notre réserve de nourriture. Nous serons quitte pour un pot de confiture et quelques oranges en moins. Etonnamment il n'a pas voulu toucher aux tranches de saucissons.

 

Finalement j'ai tout de même eu droit à une traversée avec une mer un peu forte (creux entre 1 et 2 m). Pour limiter les risques le départ était fixé à 7h. Rien de bien grave mais il a fallu pagayer pendant un bon bout de temps contre le courant. Seul regret, les photos. Par sécurité mon appareil était resté dans un caisson étanche. pagayer au lever du soleil, mémorable. Dommage, cette vision restera uniquement gravée dans mon esprit.

 

En résumé, un beau voyage, de belles histoires et des compagnons de kayak tres sympatiques. Serait ce à refaire? Je ne le pense pas, il est vrai que je ne retourne jamais au même endroit deux fois. Trop peu de temps, trop de choses à voir.